Bétail, Bestiaux
(Économie rurale). Le bétail demande, avant tout, à être placé dans de bonnes conditions hygiéniques. Les cultivateurs ne sont pas assez convaincus du tort qu’ils font à leurs bestiaux en les tenant renfermés dans des espaces étroits, privés le plus souvent d’air et de lumière, et remplis des émanations délétères que dégagent le fumier et les urines : c’est la cause première des épidémies terribles qui déciment si souvent les bestiaux. Il faut écarter le plus possible des étables les tas de fumier, les toits à porcs, les poulaillers ; il faut les balayer souvent, n’y point laisser croupir d’eaux infectes, renouveler fréquemment les litières, détacher des poutres et du plafond les toiles d’araignée qui n’ont d’autre vertu que celle de corrompre l’air et d’intercepter la lumière. Il faut, l’hiver, défendre les animaux contre le froid ; l’été, ne pas les exposer à une température trop élevée. — Des pansements et des frictions souvent répétées les maintiennent dans un état de propreté très favorable à leur santé et préviennent les maladies de peau. Un exercice modéré, principalement pour le jeune bétail, contribue beaucoup à favoriser le développement de ses forces ; la stabulation permanente ne doit être employée que pour les animaux adultes et encore, dans la plupart des cas, est-il préférable de la tempérer par un pacage de quelques heures le matin et le soir pendant la belle saison et par quelques sorties dans la journée pour aller à l’abreuvoir.
La nourriture doit être abondante et en rapport avec la nature de chaque animal et le parti qu’on en veut tirer. Si on ne lui donne à manger que pour l’empêcher de mourir, il ne produira rien ou presque rien. Les bœufs de trait veulent une nourriture substantielle, les vaches préfèrent une nourriture aqueuse, les animaux à l’engrais exigent les aliments les plus nutritifs. Les aliments doivent être variés : c’est un moyen d’en augmenter la valeur nutritive ; mais il faut éviter de faire passer brusquement les animaux d’une nourriture à une autre, ou d’une ration faible à une ration considérable. La paille, les fourrages secs ou verts, les grains, les racines et les résidus constituent la nourriture ordinaire des bestiaux. La paille seule est de peu de valeur et très chère ; mélangée avec des racines, hachée et humectée, elle peut tenir lieu de foin. Le foin de prairie convient à toute espèce de bétail ; celui de trèfle et de luzerne est presque aussi bon, le sainfoin monté en graines est même préférable pour les chevaux. En toute circonstance, le foin mélangé avec des racines ou des tourteaux profite davantage au bétail. Le fourrage vert doit être donné avec précaution, surtout s’il est humide (Voy. Météorisation). Les grains tels que l’orge et l’avoine, ne se donnent guère qu’aux chevaux et aux bêtes à l’engrais. Les carottes, les pommes de terre, les betteraves, les navets, etc., peuvent varier la nourriture des bestiaux. Les tourteaux de lin, de colza, de navette et même de chènevis sont excellents pour l’engraissement.
Le cultivateur qui veut multiplier son bétail, doit de préférence rechercher dans ses troupeaux ou dans la contrée qu’il habite des individus de bonne race, bien constitués et suffisamment développés ; si la contrée ne possède qu’une race médiocre, il pourra l’améliorer par le croisement avec des mâles d’une race meilleure tirée d’un autre pays, analogue toutefois à celui où il cultive, mais non plus riche : les grandes races transportées d’un pays fertile dans un pays pauvre donnent des produits inférieurs, tandis que les petites races transportées dans des contrées fertiles acquièrent bientôt une notable augmentation en volume et en poids. Une fois l’accouplement opéré, la femelle réclame des soins particuliers pendant la gestation et à l’époque du part ; il lui faut une nourriture plus abondante et plus choisie, un travail modéré, des pansements fréquents. Dans les premiers temps de sa naissance, le petit doit être laissé aux soins de sa mère : mais bientôt il faut lui donner un supplément de nourriture approprié à ses jeunes organes ; le moment du sevrage est aussi une époque importante : des soins intelligents qu’il reçoit alors dépendent presque toujours la bonté et la vigueur de sa constitution.
Pour les soins particuliers qu’il convient de donner à chaque espèce, Voy. Bœuf, Vache, Veau, Mouton, Brebis, Chèvre, Cochon, Cheval, Âne, Mulet, etc.
(Législation). Quand on achète des bestiaux hors des foires et marchés, il faut bien s’assurer qu’ils sont la propriété du vendeur, car s’ils ont été volés, le véritable propriétaire peut les revendiquer, sans être tenu d’en payer le prix. Si les bestiaux ont été achetés dans une foire ou un marché, ou dans une vente publique, ou d’un marchand qui en fait publiquement le commerce, le propriétaire qui prétend qu’ils lui ont été volés peut les revendiquer pendant 3 ans, mais à la charge de rembourser le prix d’achat (C. Nap., art. 2280). — L’existence de vices rédhibitoires chez des bestiaux vendus donne lieu à un recours contre le vendeur. Voy. Vices rédhibitoires.
Les personnes qui, dans l’enceinte de leurs habitations, ou dans un enclos rural, ou dans des champs ouverts, ont souffert des dégâts causés par des bestiaux laissés à l’abandon, peuvent réclamer des dommages intérêts. Elles peuvent même se saisir des bestiaux à charge de les faire conduire à la fourrière dans les 24 heures (Voy. Abandon d’animaux). Le dommage causé par des bestiaux aux champs, fruits et récoltes, est jugé par le juge de paix sans appel jusqu’à la valeur de 100 fr., et à charge d’appel, quelle que soit la valeur de la demande. Les autres dégâts causés par les bestiaux, dans quelque lieu que ce soit, et que les bestiaux aient été conduits, gardés, ou qu’ils aient seulement passé, sont soumis à la règle ordinaire de la compétence soit des juges de paix, soit des tribunaux de première instance. — Lorsque des bestiaux, ayant un conducteur ou gardien, ont passé, même sans y commettre de dommage, sur le terrain d’autrui, ensemencé ou chargé d’une récolte, ou dans un bois taillis appartenant à autrui, le tribunal de police condamne à une amende de 6 à 10 fr. Si les bestiaux sont à l’abandon, il y a délit rural, dont la peine est une amende de la valeur de 3 journées de travail au moins, ou 3 jours d’emprisonnement. Si les bestiaux ont été volontairement introduits sur le terrain d’autrui, notamment dans les prairies artificielles, dans les vignes, dans les plants ou pépinières d’arbres fruitiers ou autres, faits de main d’homme, la peine est de 11 à 15 fr. d’amende. Si, Non seulement les bestiaux ont été introduits sur le terrain d’autrui, mais qu’ils aient été gardés à vue dans des récoltes d’autrui, ou qu’ils aient commis des actes de dépaissance, la peine est d’une amende égale à la valeur du dommage causé (C. pén., art. 475, 479). L’introduction des bestiaux dans les bois est aussi réprimée par des peines. Voy. Forêts.
Les propriétaires de bestiaux qui ont péri dans une épizootie peuvent demander des indemnités contre les propriétaires voisins qui n’auraient pas pris les précautions prescrites par l’autorité pour l’isolement des bestiaux atteints par la maladie. Ceux-ci sont en outre punis d’une amende plus ou moins forte, s’ils n’ont pas enfermé leurs bestiaux, s’ils les ont laissés communiquer avec d’autres, si la communication a produit une contagion (Voy. Animaux, Épizootie). — En tout temps, les bestiaux morts doivent être enfouis dans la journée par le propriétaire et dans son terrain, à plus d’un mètre de profondeur, ou voiturés à l’endroit désigné par la municipalité pour y être enfouis, sous peine d’une amende de 3 journées de travail, ou d’un emprisonnement de 3 jours, outre les frais de transport et d’enfouissement ; si les bestiaux sont morts d’une maladie contagieuse, l’enfouissement doit être fait dans une fosse de 2m,60 de profondeur et à 100 mèt. au moins des habitations.
Quiconque blesse volontairement des bestiaux sur le terrain d’autrui, est passible d’une amende double de la somme du dédommagement, et d’un emprisonnement qui peut être d’un mois, mais qui est porté à six mois si les bestiaux ont péri de la blessure ou sont restés estropiés : la peine est doublée si le délit a été commis la nuit, ou dans une étable, ou dans un enclos rural. L’empoisonnement des bestiaux d’autrui est puni de 1 à 5 ans de prison et d’une amende de 16 à 200 fr. Celui qui, sans y être obligé pour sa défense ou pour un motif de sécurité publique, p. ex., s’il s’agissait d’un taureau furieux, tue des bestiaux d’autrui, est puni d’un emprisonnement qui peut varier de 6 jours à 6 mois. Ceux qui, sans tuer ou blesser personnellement les bestiaux d’autrui, occasionnent leur mort ou leur causent des blessures par la divagation de fous ou d’animaux malfaisants ; par la rapidité, la mauvaise direction ou le chargement excessif dès attelages ; par l’emploi d’armes sans précaution ou avec maladresse ; par jet de pierres ou d’autres corps durs ; par la vétusté, la dégradation des bâtiments ; par l’excavation ou d’autres œuvres pratiquées sur ou près les voies publiques sans les précautions ou signaux ordonnés ou d’usage, sont punis d’une amende de 11 à 15 fr. Un emprisonnement de 5 jours au plus peut être prononcé, en outre, contre ceux qui se sont servis d’armes, ou qui ont jeté des pierres (C. pén., art. 452, 453, 479, 480).
Quiconque exerce publiquement et abusivement de mauvais traitements contre les bestiaux est passible d’une amende de 5 à 15 fr. et d’un emprisonnement de 1 à 5 jours ; l’emprisonnement doit toujours être prononcé en cas de récidive. (L. du 2 juillet 1850). Voy. Animaux.