Cerf et Biche
(Chasse). La Biche porte, comme la vache, environ 8 mois ; elle met bas, vers le mois de mai, un et quelquefois deux petits qui naissent avec la livrée, et auxquels on donne le nom de faons. À l’âge de 6 mois, les faons changent de nom et deviennent hères ; pendant leur seconde année, ils sont daguets ; l’année suivante, deuxième tête, puis troisième, puis quatrième, puis dix-cors jeunement, puis dix-cors, puis grand vieux cerf. Ces dénominations diverses sont données aux Cerfs à raison des changements qui arrivent dans leur ramure, qu’on appelle aussi bois ou tête, et d’après lesquels il est possible de juger de leur âge. Voy. Tête.
C’est au commencement du printemps que les Cerfs perdent leur bois ; ils se retirent alors au fond d’un buisson et y vivent solitaires jusqu’à ce qu’il leur soit poussé une ramure nouvelle. Autrefois, il était permis de chasser le Cerf toute l’année. Lorsqu’on voulait attaquer un Cerf depuis le moment où il avait perdu son bois jusqu’au mois d’août, époque à laquelle il l’a entièrement refait, on devait le chercher dans les bordures à proximité des gagnages, ou mieux dans des buissons, d’où il ne sort que la nuit pour se rendre à son viandis ; se recélant même quelquefois plusieurs jours de suite sans aller en plaine, pour peu qu’il trouve en son buisson de jeunes taillis dont il puisse brouter les pousses. Il faut observer qu’à cette époque la tête du Cerf est molle et fort sensible, en sorte qu’il ne recherche ni le fourré, ni les taillis trop âgés dont les brins peu flexibles pourraient la blesser ; il préfère les gaulis ou de jeunes taillis. Au mois d’août, lorsque le Cerf a tout allongé et qu’il a touché au frayoir, il habite encore les mêmes demeures ; mais vers la mi-septembre commence le rut : le Cerf va rassembler les biches en harpail et les conduit au fond de la forêt ; comme il est alors presque toujours accompagné, qu’il marche continuellement, il est fort difficile de le détourner ; cependant, il lui arrive quelquefois de se séparer pendant une heure ou deux de son harpail pour prendre un instant de repos. On peut en profiter pour faire le bois, mais il est rare que cette manœuvre soit couronnée de succès, car, pendant le rut, le Cerf est toujours inquiet et demeure bien rarement en place. Lorsque la saison du rut est passée, c.-à-d. vers le milieu du mois d’octobre, le Cerf se tient en fond de forêt, et il y demeure jusqu’au mois de mars ou d’avril, époque à laquelle sa tête mue de nouveau.
Lorsqu’on se prépare à courre le Cerf, il faut donc choisir, suivant la saison, les cantons où le veneur devra aller faire le bois. On se réglera, pour placer les relais, sur l’espèce et sur la vigueur des animaux signalés au rapport. S’il est, dans les environs, un pays impraticable où l’on craint que le Cerf ne se retire, il faut en garnir les approches de gens munis de trompes, afin que, si la chasse se dirige de leur côté, ils puissent en sonnant déterminer l’animal à rebrousser chemin. — La chasse du Cerf est à peu près la même que celle du Lièvre, avec cette différence, que le Cerf, confiant en sa taille, en ses forces, n’hésite jamais à prendre un grand parti ; il n’est pas extraordinaire de lui voir faire des pointes de plusieurs myriamètres. Tous les jours, il arrive qu’un dix-cors ne se fait prendre qu’à 40 ou 50 kilomèt. de son lancé ; on en a vu qui conduisaient l’équipage à 80 kilomèt. et même plus loin. Le Cerf, soit par fierté, soit par ruse, dissimule autant qu’il peut la fatigue que lui cause la poursuite de la meute. Lorsqu ’il traverse un chemin, lorsqu’il se croit en vue, il redresse la tête et fait des efforts pour s’avancer d’un pas assuré ; mais dès qu’il se croit hors de vue, il baisse la tête, laisse pendre sa langue et marche les pinces écartées ; c’est bien le Cerf de meute. — Une des ruses auxquelles le Cerf a le plus souvent recours est de faire bondir le change (Voy. Change). Il faut alors bien se garder de donner un relais ; les chiens qu’on découplerait, n’ayant pas connaissance de l’animal de meute, empaumeraient nécessairement la voie du Cerf qui fuit devant eux. Si, au lieu d’avoir fait bondir le change, le Cerf avait mis la meute en défaut, les chiens nouveaux quêteraient à la billebaude et pourraient lancer un nouvel animal. Pour retrouver le bout de la ruse, il faut prendre des devants et des arrières (Voy. ce mot). — Lorsque le veneur est parvenu à porter le cerf bas, il lui reste un devoir à remplir : c’est de donner aux chiens une partie de la prise et de les payer équitablement de leur concours (Voy. Curée). — La chasse du Cerf demande un équipage considérable en chiens, chevaux, veneurs, et ne peut être pratiquée que par des princes ou de très-riches propriétaires.
(Cuisine). La viande du Cerf n’est mangeable que quand il est encore jeune, tendre et bien gras. Passé 3 ans, sa chair devient dure, compacte et difficile à digérer. Quand il est en rut, elle porte une odeur si forte et si désagréable qu’il est impossible de l’employer. La chair des jeunes Biches est assez délicate, mais toujours un peu fade. — On prépare ce gibier comme le Chevreuil. Voy. ce mot.