Charge
(Chasse). Avant de charger un fusil, il faut s’assurer que les cheminées ne sont point coiffées de capsules ; s’il en était ainsi, il faudrait avant tout ôter ces amorces et passer le doigt sur le sommet de la cheminée afin de faire disparaître la poudre fulminante qui pourrait s’y être attachée. On enfonce ensuite la baguette dans chacun des deux canons pour voir s’il ne s’y trouve rien. S’il y a longtemps que le fusil n’a été chargé, on fera bien de le flamber, pour chasser l’huile ou l’humidité qui pourraient se trouver dans le conduit de la cheminée. Pour cela, on coiffe chaque cheminée d’une capsule neuve, et choisissant à terre devant soi un fétu de paille ou quelques grains de poussière, on fait détoner la capsule. Si l’explosion chasse la paille, ou la poussière, la communication de la cheminée est parfaitement libre ; sinon, il faudrait brûler quelques amorces et si cela ne suffisait pas, démonter la cheminée et la déboucher avec l’épinglette. Avant de verser la poudre dans le canon du fusil, il faut abattre le chien sur la cheminée, autrement une partie de la poudre pourrait s’échapper par la cheminée, et il ne resterait plus qu’une charge insuffisante.
La charge se trouve ordinairement mesurée dans les poires à poudre ; mais il est bon de savoir que la plus grande quantité de poudre que l’on puisse brûler utilement dans un fusil doit, sans être tassée, occuper dans le canon une hauteur égale à un diamètre et demi de celui-ci. Tout ce qu’on ajouterait au delà fatiguerait l’arme sans utilité. La plus faible charge ne doit jamais descendre au-dessous de la moitié de ce chiffre. Pour trouver le volume et le poids de la charge, on choisit un bouchon de liège qui remplisse exactement le canon du fusil ; autour de ce bouchon on roule une carte et on la fixe à l’aide d’une épingle, en la laissant dépasser de trois fois le rayon du calibre : on obtient ainsi un petit dé qui renferme exactement la mesure que l’on cherche. Pour tout calibre et toute espèce de plomb, on peut, dans la charge d’un fusil de chasse, mettre une quantité de poudre déterminée par le huitième du poids du plomb, savoir : pour les calibres de 28 à 20 : 32 gr. de plomb et 4 gr. de poudre ; pour les calibres de 20 à 14 : 39 gr. de plomb et 5 gr. de poudre ; pour les calibres de 14 à 8 : 46 gr. de plomb et 6 gr. de poudre. Ce sont là les charges de poudre les plus fortes qu’on puisse employer. Les poires à poudre et les sacs à plomb sont généralement gradués d’après les proportions les plus faibles, comme il suit :
Calibres – Poudre – Plomb.
24 – 55 grains (2 gr., 8) – 23 gr., »
22 – 60 grains (3 gr., 1) – 25 gr., »
20 – 65 grains (3 gr., 3) – 30 gr., 5
18 – 70 grains (3 gr., 7) – 34 gr., 3
16 – 75 grains (3 gr., 9) – 37 gr., »
14 – 80 grains (4 gr., 2) – 40 gr., 9
12 – 90 grains (4 gr., 7) – 45 gr., 7
Ces proportions peuvent être un peu augmentées sans inconvénient ; mais il faut remarquer que la différence entre la charge la plus forte et la charge la plus faible doit être calculée d’après le poids plutôt que d’après le calibre de l’arme.
Quand on a versé dans chaque canon la charge de poudre qui lui est destinée, on met dans l’un et dans l’autre une bourre (Voy. Bourre), que l’on enfonce avec la baguette, en la poussant par le gros bout, sans frapper fortement, et aussi sans trop fouler la charge, ce qui aurait l’inconvénient d’écraser la poudre et d’en diminuer considérablement la force. Cela fait, on place la baguette dans le canon gauche en ayant soin de mettre en haut le gros bout ; on verse alors le plomb dans le canon droit, et on met par-dessus une bourre que l’on assujettit en la pressant avec la baguette, puis on retourne celle-ci et on la remet dans le canon chargé en ayant soin de placer toujours le gros bout en l’air ; de cette manière, si quelques grains de plomb s’échappent et coulent dans le canon voisin, ils n’empêcheront pas de retirer la baguette, ce qui aurait lieu, s’ils s’introduisaient entre la paroi et le gros bout. On met alors le plomb dans le second canon, puis une bourre, et quand celle-ci est assujettie on remet la baguette à sa place. Pendant cette opération, il faut tenir le fusil éloigné d’environ 0m,20 du corps et le canon un peu incliné en avant, de manière que, si par un accident quelconque le coup vient à partir, le plomb puisse passer loin du visage. Il ne reste plus qu’à mettre des capsules sur la cheminée : en faisant cette dernière opération on ne doit jamais tenir son arme dans une position horizontale ; les canons doivent être relevés et faire avec l’horizon un angle d’au moins 45 degrés. Il faut assujettir la capsule en la comprimant doucement à l’aide du chien ; en la frappant, on s’exposerait à la faire détoner (Voy. Capsule). — Lorsqu’on est en chasse et que l’on vient de tirer un coup, il faut toujours, avant de recharger son arme, avoir la précaution d’abattre le chien du coup qui est resté chargé. On tourne l’embouchure du canon déchargé du côté d’où vient le vent, afin de faire sortir la fumée et les gaz qui s’y trouvent encore, on l’abaisse ensuite à terre pour faire tomber la crasse qui n’est pas adhérente aux parois et, comme il arrive quelquefois qu’il reste dans le canon un ou deux grains de plomb, on empêche ainsi qu’ils ne viennent se placer au fond de la chambre et n’interceptent le conduit de la cheminée. Après avoir pris ces précautions, on charge comme il a été dit ci-dessus.